S’il est plus doué que les autres et s’ennuie en cours, il n’a qu’à sauter une classe ! Si seulement c’était si simple. Échec scolaire et difficultés peuvent aussi faire partie du quotidien des enfants précoces, quel que soit le niveau scolaire. Aujourd’hui, les options se multiplient. Le rapport de Jean-Pierre Delaubier, inspecteur de l’Éducation Nationale en 2002 interpellait déjà l’attention du ministère sur la réalité des enfants précoces. Depuis, même si elles ne se sont pas assez généralisées, les solutions proposées évoluent. Petit récapitulatif des aménagements pour enfants à haut potentiel.
Rappel sur la précocité
Définition et prise en charge
Appelés « élèves intellectuellement précoces » (EIP), « surdoués », « à haut potentiel » ou « à haut potentiel intellectuel », ces enfants ont un développement intellectuel en avance par rapport aux camarades de leur âge. Leur compréhension et leur mode d’apprentissage sont particuliers. Sur le plan affectif et cognitif, ces élèves singuliers ont parfois besoin d’être accompagnés dans leur scolarité pour s’assurer de leur épanouissement intellectuel et émotionnel. Les enfants à haut potentiel représentent actuellement entre 2 et 5 % des élèves, tous niveaux et milieu social confondus.
Lorsqu’il y a suspicion de précocité, les parents sont encouragés à en discuter avec le professeur de l’enfant et à prendre rendez-vous avec le psychologue de l’établissement. L’équipe éducative (le directeur de l’école, la famille, l’enseignant de la classe, le psychologue, le médecin de l’éducation nationale et tout professionnel extérieur que les parents jugent intéressant de convier) peut ensuite se réunir afin de définir les difficultés et les potentiels de l’enfant et envisager des aménagements adaptés. Tout comme il existe des adaptations pour le TDAH, la dyslexie, la dysphasie, la dyspraxie et autres troubles de l’apprentissage. Le référent EIP de l’académie est également à la disposition des parents et de l’équipe enseignante pour élaborer des dispositifs spécifiques aux besoins de l’enfant HP. Ces aménagements ne sont pas une démarche marginale, bien au contraire, ils ont vocation à se généraliser pour permettre aux enfants surdoués de développer pleinement leur potentiel.
« Des aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités. La scolarité peut être accélérée en fonction du rythme d’apprentissage de l’élève »
Article L321-4 du code de l’éducation.
Aménager la vie scolaire de l’enfant intellectuellement précoce
S’adapter et pratiquer la différenciation
Puisque cet élève ne réfléchit et ne comprend pas comme tout le monde, il est intéressant de proposer la différenciation pédagogique : adapter la tâche à l’élève ou accélérer sa progression dans certaines matières par exemple. S’adapter c’est aussi privilégier l’oral pour éviter l’écrit parfois plus laborieux pour eux, mais aussi veiller à limiter les activités répétitives et exercices redondants. Cet élève est avide de sens. Des travaux personnalisés ou des exposés sont plus en phase avec son mode de fonctionnement. Avec sa grande sensibilité, l’EIP est très attentif au jugement que l’enseignant porte sur lui. Il est capable de travailler efficacement pour faire plaisir à son professeur. Il a souvent besoin d’une forme de connivence, de complicité ou de défi envers lui pour libérer tout son potentiel. Conscient de la singularité de son élève, l’enseignant peut accepter de le laisser faire plusieurs activités simultanément et l’autoriser à choisir comment il souhaite effectuer son travail, en notant qu’il est primordial de lui indiquer précisément ce qu’il attend de lui.
Proposer un parcours aussi riche que son potentiel
Pour permettre à l’élève de rester au sein de sa classe, l’enrichissement des apprentissages est un excellent moyen adaptable à tous les niveaux. Il peut s’agir d’enrichir les compétences de l’élève grâce à des activités de découvertes qui le confrontent à des univers variés. Cela peut être aller dans une exploitation agricole autosuffisante pour étayer un cours sur le développement durable. Le travail en groupe est aussi une méthode propice aux débats et à la créativité. Cela peut prendre la forme d’un exposé sur les éoliennes qui sollicitera l’écrit, l’oral et les visuels autour d’un sujet qui a du sens pour lui. Enfin, mettre l’élève en situation de chercheur est également un excellent moyen d’enrichir le cours. Lui demander de créer un emballage alimentaire écologique, par exemple, est un travail autonome qui va dynamiser le sujet abordé.
Faire tomber les barrières
Le décloisonnement est la clé ! Pourquoi contraindre l’élève HP à suivre des cours qui sont inférieurs à ses capacités ? En lui permettant d’assister aux activités qu’il préfère dans des niveaux de classe supérieurs, les enseignants le motivent et évitent qu’il ne s’ennuie ou ne perturbe la classe involontairement. Tout en restant concentré sur les matières qu’il maîtrise moins bien dans son propre niveau, l’EIP enrichit ses compétences dans ce qui le passionne. Décloisonner les enseignements implique d’adapter les emplois du temps et il est du ressort des enseignants de tout mettre en œuvre pour aboutir au succès de la démarche. De toute évidence, le décloisonnement est une solution sur-mesure plus efficace que le risque de sauter une classe et de déstabiliser l’élève dans les matières ou apprentissages qu’il maîtrise moins.
Accélérer son cursus
Il s’agit de réduire la durée d’un niveau comme proposer une admission en CP à un élève en cours d’année de grande section s’il a déjà acquis la lecture. Des sauts de classe à n’importe quel moment de l’année scolaire pour conserver la motivation de l’élève et lui donner suffisamment de nourriture intellectuelle sont préconisés. L’accélération peut être envisagée de différentes façons comme par exemple un raccourcissement de cycle de trois ans en deux ans, tout en conservant l’intégralité du programme. Les classes à doubles niveaux constituent d’excellents moyens d’enrichir les apprentissages et d’envisager un saut de classe.
Aménager des lieux dédiés
Au-delà des compétences, c’est aussi le bien-être et la socialisation de ces élèves un peu différents qu’il faut privilégier. Si tous les hauts potentiels sont réunis dans une même classe, ils risquent d’être marginalisés et rejetés par les élèves des autres classes, qui vont les catégoriser. L’idéal est donc de les intégrés aux classes ordinaires tout en leur proposant des espaces dédiés, notamment au collège et au lycée, pour qu’ils puissent réaliser des ateliers ou se détendre et discuter. Cette salle de ressources est destinée aussi à pouvoir échanger avec un adulte, résoudre des conflits ou prendre en charge des émotions.
Les parcours spécifiques
Tous ces aménagements répondent à une prise en charge adaptée de l’enfant intellectuellement précoce, mais dans les cas de difficultés d’apprentissage sévères et d’échec scolaire, des dispositifs officiels sont proposés aux parents et à l’enfant. Ces aménagements institutionnels sont le programme personnalisé de réussite éducative (PPRE) et le plan d’accompagnement personnalisé (PAP).
Le programme personnalisé de réussite éducative (PPRE) : il concerne les élèves qui risquent de ne pas maîtriser certaines connaissances et compétences attendues à la fin d’un cycle. C’est un ensemble d’actions répertoriées dans un document qui mentionne les objectifs, les moyens, les échéances et les modes d’évaluation. Son but ? Motiver et valoriser l’élève surdoué. Il implique la famille, l’EIP ainsi que l’équipe pédagogique de l’élève.
Le plan d’accompagnement personnalisé (PAP) : Il concerne les élèves présentant des difficultés scolaires sévères liées à des troubles de l’apprentissage. C’est un document qui répertorie les aménagements et adaptations pédagogiques appliqués à l’EIP. Ce suivi est tenu par les enseignants de l’élève de la maternelle au lycée, afin d’éviter la rupture dans les adaptations d’une année à l’autre.
Source : https://eduscol.education.fr/
Pour certains enfants précoces, la scolarité se déroule sans encombre. Pour un plus grand nombre, elle se heurte à des incompréhensions, des difficultés et des problèmes d’intégration. Pour tous ces élèves-là, l’éducation nationale continue d’améliorer les aménagements et les moyens de prises en charge. Ces recommandations sont des pistes à emprunter et à adapter pour éviter les écueils tels que laisser ces élèves s’ennuyer, leur donner plus de travail que les autres ou pire encore, les forcer à se couler dans le moule de la classe ! Cultiver le génie est une aventure à vivre pour les parents et les enseignants !
