J’en ai marre ! De toute façon, ma vie ne sert à rien ! Si vous avez déjà entendu ces propos sortir de la bouche de votre enfant, la crise de l’adolescence vient de s’inviter chez vous ! Crise d’identité, sautes d’humeur… certains ados s’y heurtent de plein fouet et côté parents il y a des dommages collatéraux. Comment définir cette crise ? Pourquoi surgit-elle à l’adolescence ? Comment bien la gérer ? Voici quelques pistes.
La crise d’adolescence, qu’est-ce que c’est au juste ?
C’est cette période compliquée durant laquelle votre adolescent manifeste des troubles comportementaux : attitudes de défi, changements brusques d’humeur, comportements excessifs… Elle survient durant le passage de l’enfant à l’âge adulte et nous aurions tort de minimiser la violence de cette transition. L’enfant est secoué par des changements hormonaux, physiques et neurologiques qui le submergent.
Cette période déstabilisante propulse le jeune dans un corps d’adulte, un monde inconnu dans lequel il n’a encore aucun repère. Comment se protéger ? Certains adolescents réagissent par une forme de régression pour retrouver la sécurité de l’enfance. Mais cette attitude est parfois dure à gérer pour les parents. Rapports au corps compliqués, comportements autodestructeurs ou encore consommation d’alcool ou de drogue sont des attaques contre ce corps changeant, si difficile à adopter et à accepter.
9% se font souffrir régulièrement (Scarifications, brûlures…)
Pour couronner le tout, la crise d’adolescence apporte son lot d’idées noires et de négativité. Dépression et tentative de suicide touchent une minorité de cette jeune population, mais c’est suffisant pour faire planer sur les parents une véritable crainte. Selon une étude menée auprès de 15 000 jeunes Français de 13 à 18 ans par une équipe de l’INSERM, 8% des adolescents pensent que « la vie ne vaut pas la peine d’être vécue ».Cette bascule entre l’enfant et l’adulte engendre une ambivalence, notamment vis-à-vis des parents. En effet, pendant cette transition, l’adolescent va alterner entre le besoin de tendresse et le rejet de toute forme d’affection émanant du parent. Un jeu d’affirmation et de différenciation qui se joue au cœur de la famille.
7,8% ont déjà tenté de se suicider
Quelles sont les bonnes attitudes à adopter avec son adolescent ?
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Parler encore et toujours ! Sans oublier d’écouter…
Sans heurter les plus réservés, il faut néanmoins trouver le moyen d’établir une forme d’échange, ouvrir une porte à la communication. Proposer une conversation, en laissant votre ado décider du moment qui lui convient, est un bon début : « Quand tu auras un moment de libre, ça me ferait plaisir de pouvoir discuter un peu avec toi » est un exemple d’amorce à la discussion. Si votre enfant n’est pas à l’aise avec le sujet qui vous préoccupe (cigarette, sexualité, alcool…) il vaut mieux lui exposer votre avis sans lui imposer de répondre. Il ne répond à aucune de vos sollicitations ? La discussion en groupe sera peut-être plus porteuse ! La parole n’est pas la seule façon de communiquer. Un sms, un email ou une lettre sont aussi salutaires pour renouer le dialogue. Parfois même, se poser ensemble devant un bon film ou un épisode de série est plus propice qu’on ne l’imagine. Lorsque les échanges sont engagés, il faut savoir écouter, prendre le temps de comprendre son point de vue de jeune et envisager des compromis sécurisants.
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La curiosité est un vilain défaut
Savoir respecter son intimité est important. Même si la tentation est grande, mieux vaut éviter de lire son journal intime, ses mails, ses textos ou son WhatsApp. Dans cette période où l’adolescent fuit sa famille et cherche la liberté auprès de ses amis, faire intrusion dans son univers risque de briser vos relations déjà fragilisées. Si les parents s’immiscent dans les seules activités qui permettent à leur enfant de s’éloigner du cocon familial, ils l’empêchent de se construire en tant qu’adulte. Au contraire, respecter sa vie privée va lui donner confiance en lui. Ce qui ne vous empêche pas de le conseiller et de l’avertir des dangers qu’il pourrait ignorer.
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Puisqu’on ne maîtrise pas tout, détendez-vous !
« Être des parents parfaits, c’est presque impossible à faire. Ce serait même dramatique. Si vous avez une image claire et préconçue de ce qu’est votre rôle, alors, vous serez trop stricts, en dehors des réalités. Les parents font des erreurs d’adaptation, et dans ce cas, mieux vaut l’avouer à votre ado. On peut très bien lui dire “écoute, on fait ce qu’on peut, on ne comprend pas tout, mais on essaie” ».
Françoise Rougeul, psychanalyste et thérapeute familiale
Lorsque vous êtes sur le point de craquer, rappelez-vous la crise de ses 2 ans ou de la période du « NON ». Comme toutes les phases de construction de la personnalité, la crise d’adolescence n’est que passagère ! Au risque d’affoler encore davantage les parents déjà inquiets, il faut garder en tête que poser trop d’interdits à son adolescent (ne pas fumer, ne pas boire d’alcool, ne pas rentrer tard…) aura généralement l’effet inverse et toutes ces restrictions seront transgressées ! vous êtes prévenus.
Pour 80 % des ados, la crise d’adolescence se passe bien
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Comportements à risque en ligne de mire
L’anorexie, la boulimie, la toxicomanie, la dépression sont entre autres des comportements à risque qui méritent toute votre attention. Lorsque la crise d’adolescence porte atteinte à la sécurité et à la vie de l’enfant, se faire aider d’un professionnel est tout indiqué. Le pédopsychiatre, qui pourra prescrire des médicaments si nécessaire, peut prendre en charge votre enfant. Il nécessite une prescription du médecin généraliste. Le psychologue va plutôt traiter votre enfant par le dialogue. La consultation d’un psychologue en ligne favorise la prise en charge rapide des cas les plus urgents ou des familles françaises expatriées. La téléconsultation ou visioconférence est d’une qualité équivalente à une consultation en cabinet, autant en profiter !
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Acceptez de tomber de votre piédestal
Alors que vous étiez le plus fort des papas et la plus belle des mamans, vous voici la cible de railleries de votre chère progéniture. La crise d’adolescence n’épargne pas les parents dont les moindres faux pas ou défauts sont montrés du doigt. La bonne attitude ? Accepter d’être différent de votre adolescent ! Vous n’écoutez pas la même musique, vous n’avez pas les mêmes styles vestimentaires et ne pensez pas comme lui ? C’est une bonne chose. En affirmant vos différences, vous l’aidez à se construire et à se singulariser.
Patience et cohérence
Vous mettez votre enfant en garde contre les dangers du tabagisme ? De grâce, ne fumez pas vos deux paquets par jour ! En matière d’éducation, gardez le cap. Rester fidèle à ses valeurs et à son mode éducatif, c’est aussi rassurer son enfant grâce à des repères qu’il connaît bien. Certes, s’adapter aux besoins de votre adolescent en souffrance est salutaire, mais il ne faut pas que cela soit trop déstabilisant. Vous n’êtes pas parfaits et heureusement pour lui. Comment pourrait-il se défaire d’une famille idéale pour construire sa propre vie ? Être un bon parent n’est pas une norme. C’est plutôt la capacité à accepter son enfant tel qu’il est, dans toute sa singularité. La force de composer avec les changements et les crises sans cesser de lui témoigner son soutien et son amour.
Beaucoup de parents vivent dans l’angoisse de voir surgir cette crise d’adolescence dans leur foyer. Pourtant les cas les plus graves sont minoritaires, mais la surreprésentation médiatique entretient à tort un climat anxiogène autour du sujet ! Alain Braconnier, médecin psychiatre et psychanalyste spécialiste de l’enfant et d’adolescent rappelle également que : « Les ados d’aujourd’hui sont différents de ceux des générations précédentes pour une raison assez évidente : leurs moyens de communication et d’information, depuis leur plus tendre enfance, ont été beaucoup plus importants. Ils ont un accès démultiplié au savoir, aux informations, à la consommation. Cela crée une génération probablement beaucoup plus ouverte, beaucoup plus curieuse, beaucoup plus exigeante et demandeuse aussi. »